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La visite de l'Institut Paul Bocuse

    Nous sommes le vendredi 7 octobre 2016, il est un peu moins de dix heures lorsque nous traversons le parc pour rejoindre le Centre de Recherche Institut Paul Bocuse. Les premiers rayons de soleil viennent illuminer le parc et les bâtiments qui n'en paraissent que plus beaux et luxueux. M. Maxime Michaud nous rejoint à l'extérieur et nous accueille avec le sourire. Après quelques minutes de discussion concernant les prises de vue et de son, nous sommes invités à déposer nos affaires superflues dans une salle du Centre de Recherche pour ensuite commencer la visite des lieux.

    La prise en main du matériel multimédia effectuée, nous pouvons entamer notre visite. M. Michaud nous propose de commencer par un café. Nous nous rendons donc dans le restaurant et bar d'application situé dans l'espace pédagogique de l'institut Paul Bocuse accompagnés de Sonia Bouïma, une doctorante qui travaille sur l'action sociale autour de l'alimentation. Nous discutons par petits groupes autour de nos cafés. Ainsi, loin d'être un simple temps mort, M. Michaud nous propose de faire l'expérience de la convivialité autour du partage. Cela permet de faciliter les échanges, de "briser la glace". Ce moment est donc parfaitement dans le thème des pratiques liées à l'alimentation.
 

     Ce bar est un lieu d'innovation et d'expérimentation pour les étudiants de l'institut Paul Bocuse. Ils s'y entraînent au service mais aussi à l'art de la mixologie puisque les boissons changent chaque jour. C'est un lieu de pratique en effet, mais aussi un lieu de détente pour les étudiants. Il dispose d'une terrasse ainsi que d'une table de billard où les étudiants se rassemblent. Ainsi, de jeunes hommes étaient en train de faire une partie tandis que d'autres étudiants prenaient un café dehors. Dès le premier coup d’œil, on remarque la présence d'un dress-code alliant noir et blanc et qui varie en fonction du sexe et de la position hiérarchique mais aussi, de l'exercice de la cuisine ou de l'hôtellerie. Ce détail qui peut paraître anodin, est en réalité porteur de sens. En effet, porter un uniforme met à la vue de tous d'une part, l'appartenance à un groupe, une équipe et donc l'importance de la cohésion mais aussi les différences de statut au sein de ce groupe et donc la considération à l'égard de la hiérarchie.

     "On peut constater aussi qu’il y a un dress-code pour les étudiants et pour le personnel. C’est assez rare en anthropologie que     l’on soit en costumes/cravate. C’est ce que j’ai dû apprendre pour me fondre avec mes indigènes, mettre aussi le costume/cravate." [Extrait de la bande son de la visite, M.Maxime Michaud].

    Une fois notre café terminé, M. Michaud entreprend un bref historique de l'institut Paul Bocuse. Il y explique que les politiques publiques souhaitaient vraiment garder l'établissement ouvert car elle représente "une vitrine de la gastronomie française". On comprend aisément que dans cette décision politique, la volonté de préservation du patrimoine culinaire a joué un rôle important. En effet, car dans l'idée de patrimoine, il y a l'idée d'une histoire commune et donc, cela revêt des enjeux d'identification à l'échelle nationale mais aussi à l'échelle internationale. Et, dans le prolongement, des aspects économiques importants notamment pour ce qui attrait à la question du tourisme.

    Cette contextualisation terminée, nous nous rendons dans la salle de restauration attenante qui fonctionne sur le même principe que le bar et qui a pour vocation d'effectuer le service du midi pour le personnel et les étudiants. Les étudiants chargés du service et de la restauration effectuent un roulement toutes les trois semaines dans tous les restaurants de l'institut Paul Bocuse pour développer une capacité d'adaptation en fonction des caractéristiques culinaires et du type de clientèle associées à l'établissement. Nous nous dirigeons vers les espaces pédagogiques du second étage dont la vocation est surtout l'enseignement théorique. Dans les escaliers, nous croisons un groupe de touristes australiens.

    Le second étage est moderne et dispose de nombreuses salles de cours. Les murs sont ornés de bandes de couleurs vives et de citations peintes. Nous restons discrets afin de ne pas perturber les enseignements. Une petite salle de travail ouverte et traversante disposant de fauteuils et de tables donne sur la passerelle qui mène au château. Un de ses murs accueille "le mur des talents". Il s'agit d'une exposition photographique d'étudiants qui doivent mettre en valeur une de leur création ou plus largement, un de leur talent. L'accent est mit ici sur les compétences individuelles et l'innovation qu'elle promet dans le futur par leurs complémentarités. On retrouve ici l'importance de l'équipe, du collectif mais aussi l'idée d'évolution, de progrès.

    Nous empruntons la passerelle. Nous accédons au château dont les espaces ont été aménagés en salles de cours thématiques ou salons. Ils servent à la fois de lieu d'enseignement pour les étudiants, mais aussi parfois de lieu d'enseignement pour des professionnels. Ces espaces peuvent également être loués par des entreprises. Dans le couloir, un livre géant est ouvert sur une citation: "L'élégance du geste, l'élégance de la tenue, portez ce que vous êtes". Elle révèle l'importance de l’esthétisme dans le monde de la cuisine et de hôtellerie qui doit transparaître dans les savoir-faire mais également être représentée dans la posture, la tenue. Il s'agit d'allier savoir-faire et savoir-être.

    "L’idée de ces salles c’est d’avoir des espèces d’immersion [...] dans lesquelles on puisse parler d’un sujet tout en le côtoyant et l’avoir autour de nous." [Extrait de la bande son de la visite, M. Maxime Michaud]

    Nous continuons par la visite des salles de cours thématiques réalisées avec l'aide et le financement d'entreprises partenaires. Celle de l'art de la table, du café, du thé puis de la mixologie. Ces espaces ont pour objectif de créer une immersion, ce qui sous entend la nécessité de la création d'un univers associé à chaque thématique. Ainsi, dans la salle dédiée au café, on note la prédominance du bois et de couleurs chaudes ainsi qu'une volonté d'allier ancien et moderne notamment par l'exposition de machines à café ou à moudre le café datant de différentes époques. C'est une décoration de type néo-colonial. Pour ce qui est de la salle du thé, on remarque la prédominance du blanc et une décoration épurée, toute en transparence qui réfère à une décoration zen. La dégustation des produits est associée à une expérience sensible qui semble se traduire dans la décoration mais celle-ci réfère aussi et plus largement à l'histoire et donc à des représentations collectives.

    Une fois, la visite des quatre salles thématiques terminée, nous nous dirigeons vers le rez de chaussé du château. Nous passons devant une ancienne chapelle aujourd'hui utilisée comme un salon d'accueil lors d'évènements et nous descendons les imposants et majestueux escaliers en pierre. Tout le long de la descente, on rencontre les "mentors", les personnalités importantes de l'institut Paul Bocuse à travers de grandes photographies en noir et blanc. Elles sont à la fois l'expression de la nécessité de la transmission mais aussi des sources de mémoire et d'identité du lieu en ce qu'elles représentent des savoirs culinaires.

    Nous passons par l'accueil et visitons rapidement les salles du restaurant Saisons, l'un des restaurants d'application, celui-ci gastronomique, comme nous l'avons vu plus haut. Nous continuons ensuite par les cuisines où nous sommes subjugués par la vision imprenable que nous avons sur ce microcosme par l'intermédiaire d'un baie vitrée. En effet, cela pourrait presque s'apparenter à une mise en scène qui évoque un jeu de clair-obscur. On joue sur la transparence, on montre et par conséquent on démontre.

   Dans la continuité, nous nous rendons au jardin attenant. Autrefois lieu pédagogique et d'expérimentation afin de comprendre le lien des enfants aux légumes créé sur l'initiative d'un chercheur, il sert aujourd'hui de potager pour les plantes aromatiques des cuisines de l'Institut Paul Bocuse. Nous croisons justement une étudiante à la recherche de menthe. Cela renvoie à une échelle réduite à la philosophie "du potager à l'assiette" qui se développe beaucoup aujourd'hui avec l'idée d'un produit plus "naturel" qui serait un gage de qualité mais aussi de santé.

   Nous retournons dans le premier bâtiment pour visiter les espaces pédagogiques du premier étage. Là, nous croisons de nouveau les touristes australiens dans un amphithéâtre qui suivent un cours de cuisine en anglais. On retrouve dans cette image l'idée de la cuisine comme patrimoine dépositaire d'une identité à la "française". Mais cela témoigne également d'un regain d'intérêt pour le monde de la gastronomie.

    Au même étage, de part et d'autre d'un couloir, deux cuisines: l'une dédiée à l'apprentissage de la pâtisserie, l'autre à celle de la cuisine. Pour des questions d'hygiène, nous ne pouvons pas y accéder. Cela pose la question de la relation entre souillure et ordre social. Nous n'avons pas les codes d'hygiène adéquates, nous ne pouvons donc pas entrer, au risque de menacer l'ordre établit dans les cuisines.

 

    "Normalement, il faut mettre une blouse et des sur-chaussures pour des questions d’hygiène. Vous pouvez voir sur le côté, la pâtisserie ici et la cuisine là. Vous pouvez regarder depuis l’entrée." [Extrait de la bande son de la visite, M. Michaud]

    Par la suite, nous faisons le chemin inverse pour retourner vers l'accueil et descendre dans la cave, espace entièrement dédié au vin. Nous descendons les escaliers pour pénétrer dans un couloir décoré de stands détenus par des entreprises privées et dédié à la mise en valeur de leurs produits. Un stand en particulier attire notre attention. Il présente des vins luxueux issues de différentes régions, de différents "terroirs" en présentant la terre, les sols. La promotion des produits de cette marque passe par un ancrage local, une valorisation du patrimoine agricole et des savoir-faire des exploitants. C'est intéressant et cela rejoint ce que nous avons pu voir précédemment sur la philosophie "du potager à l'assiette" mais aussi autour du phénomène d'identification mais cette fois-ci à une échelle locale et non plus nationale.

   Nous terminons la visite des espaces pédagogiques de l'Institut Paul Bocuse par la salle accueillant les cours d’œnologie et de sommellerie, situé au bout du couloir. Nous sortons ensuite du château pour rejoindre par le parc les anciennes écuries qui abritent dorénavant le Centre de Recherche. Nous commençons par nous rendre dans la salle du restaurant expérimental qui permet aux chercheurs de travailler sur des questions telles que le consommation du pain lors d'un repas en faisant appel à des participants et en les mettant en situation. Ainsi, la salle a été conçue de façon à ce que l'espace soit entièrement modulable et dispose de caméras pour pouvoir procéder à un travail d'analyse de l'expérience.

   Pour finir, M. Michaud nous invite au premier étage du bâtiment, dans les bureaux des chercheurs afin de rencontrer et de dialoguer avec ses collègues. Nous rejoignons ensuite la salle de travail où nous avions déposé nos affaire afin de commencer l'élaboration de nos projets.

Historique de l'institut Paul Bocuse - M. Maxime Michaud
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La transparence - M. Michaud et M. Givre
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Sur le terroir - M. Michaud et M. Givre
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Conception: Julie Quillon.

Contenu: Chani Bonventre ; Christabelle Aubras ; Claudie Castellano ; François Villaeys-Dumont ; Julie Quillon ; Laura-Huong Ait Siselmi ; Léna Davanceau ; Nicholas Dugot ; Pauline Maireville ; Veronika Petrova.

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